Image
Image

Mallette pédagogique

Patrimoine des Hautes-Pyrénées

Le thermalisme et le pyrénéisme dans les Hautes-Pyrénées

Découvrir la montagne au 19e siècle.

Image

Dossier 1 

Dossier 2 

Dossier 3 

Dossier 4 

Dossier 5 

Dossier 6 

Image

Les vertus thérapeutiques de l’eau sont connues depuis l’Antiquité. Cependant, c’est à la fin du 18e siècle qu’une médecine plus scientifique amène une meilleure connaissance des vertus de l’eau et une organisation moderne des cures.

Les sources d’eau minérales qui étaient autrefois utilisées de manière empirique sont l’objet d’études chimiques approfondies : elles sont classées selon leur composition (sulfureuse, ferrugineuse, carbonique…) auxquelles correspondent des vertus spécifiques. Les médecins prescrivent des bains, cataplasmes, des boissons, et encouragent l’activité physique au grand air, les activités sociales.

Des stations thermales voient le jour, avec des aménagements qui seront sans cesse modernisés tout au long du 19e jusqu’à nos jours.
Ainsi, à partir des cabanons modestes qui entourent les premiers bains, toute une architecture se structure, des établissements de bains jusqu’aux hôtels, sans cesse modernisés, en passant par des villas aux styles affirmés, des parcs et jardins aux promenades aménagées. 
Les thermes de Bagnères-de-Bigorre, le Grand hôtel d’Angleterre de Cauterets, le casino de Luz-Saint-Sauveur, les villas et les jardins d’Argelès-Gazost, ou encore le parc thermal de Bagnères-de-Bigorre, sont des exemples emblématiques du thermalisme dans les Pyrénées et des aménagements spécifiques qu’il a suscités.

La « fièvre thermale » qui agite le pays gagne aussi les petites vallées : en 1864, Henry Russell réalise l’ascension des Gourgs Blancs et ouvre les portes de la vallée du Louron. Les eaux sulfureuses de Cadéac, près d’Arreau, bénéficient de deux établissements modestes. Une architecture de villégiature y voit le jour, comme ce « chalet chinois » ou l’hôtel de la Villa Graziella. 
 

Image
Retour au menu

Image

Le thermalisme s’accompagne d’une exploration des Pyrénées : les premiers touristes venus ici en cure partent en excursion dans la montagne, explorent les vallées, visitent les églises… Routes et voies ferrées ouvrent les Pyrénées aux visiteurs lointains, venus de Paris ou d’Europe. Thermalisme rime avec naissance du tourisme.

Le romantisme européen du 19e siècle valorise la nature, l’individu, le sublime, les émotions…, en réaction à la modernité naissante. Pour fuir l’industrialisation, la haute société recherche des paysages sauvages, inspirants, grandioses. Ce courant influence la naissance du tourisme dans les Pyrénées.

Une route thermale

Par décret impérial, la construction de la route thermale n°1, destinée à relier les grands bains des Pyrénées, est officialisée en 1860. L’empereur Napoléon III, venu l’été précédent à Luz-Saint-Sauveur, a vu tout l’enjeu stratégique de cette route, qui permettra aussi l’exploitation des forêts, mines et carrières, tout en longeant la frontière espagnole. Par ailleurs, les connaissances topographiques s’améliorent grandement grâce à la carte détaillée établie par Franz Schrader en 1874.
Lorsque la route thermale atteint Arreau, la petite ville devient une porte d’entrée touristique vers les hautes vallées et le col d’Aspin, mais c’est surtout l’arrivée du train en vallée d’Aure en 1887 qui donne une nouvelle (mais brève) impulsion à la station thermale de Cadéac.

Le chemin de fer

L’arrivée du chemin de fer désenclave les Pyrénées, facilite l’acheminement des voyageurs tout en dynamisant le développement économique des vallées. En 1862, Bagnères-de-Bigorre inaugure sa gare de briques, devenant la première station thermale à être reliée au chemin de fer. En 1866, le train arrive à Lourdes, point de départ pour le développement des lignes vers les stations pyrénéennes. La gare de Cauterets sera inaugurée en 1898. 

Image
Retour au menu

Image

Quand débute l’exploration des Pyrénées, principalement à partir du 18e siècle, les scientifiques et voyageurs qui parcourent ces montagnes vont souhaiter partager leurs découvertes à travers des écrits ou des œuvres d'art. Un siècle plus tard, ce mouvement sera nommé « le pyrénéisme ».

Les pyrénéistes lient l’expérience sportive d’une ascension en montagne, à une émotion esthétique, sensible et culturelle. Ils étudient, décrivent la montagne et cherchent à comprendre et à raconter ce qu’ils observent scientifiquement, ce qu’ils ressentent. Tous ont à cœur de partager leurs visions des Pyrénées.

Des scientifiques naturalistes aux romantiques

Ramond de Carbonnières (1755-1827) est parmi les pionniers à étudier et décrire la flore et les formations géologiques. Il mêle science naturaliste et lyrisme dans ses ouvrages et inspirera de nombreux voyageurs et écrivains. « Ces montagnes, si longtemps négligées, offrent au voyageur des spectacles grandioses, des paysages où la nature a déployé toute sa puissance et sa beauté. »
Henry Russell apporte une vision passionnée, quasi mystique de la montagne. Il fait venir la haute société sur le Vignemale et popularise les Pyrénées à travers les articles qu’il publie dans de grandes revues.

L’œuvre fondatrice

Henri Béraldi est l’inventeur du terme « pyrénéisme ». Il publie à partir de 1898 « Cents ans aux Pyrénées », sept volumes consacrés à ce mouvement qu’il définit en 3 mots : « ascensionner, écrire, sentir ». L’œuvre est rapidement saluée comme une « chronique magistrale et incontournable » par les cercles littéraires et les passionnés des montagnes.

L’acrobatie dans les montagnes ! 

Le nouveau siècle retentit et une nouvelle génération de montagnards arrive avec une vision différente, celle de la conquête, la recherche de difficultés où l’exploit prévaut. La première excursion à ski au lac de Gaube en 1903, près de Cauterets, inaugure un glissement. Henry Russell fustige ces pratiques sportives éloignées de toute contemplation, qu’il qualifie « d’acrobatie dans les montagnes ». La transition vers le ski dès les années 1910-1920 marque la fin du pyrénéisme classique.

L’intérêt pour les cultures locales

Au début du 20e siècle, une nouvelle forme de pyrénéisme s’intéresse aux coutumes et traditions locales : à l’exemple du travail minutieux de la dessinatrice britannique Violette Alford, qui parcourt systématiquement chaque vallée et dessine danses et costumes. 

Image
Image

Le comte Henri Russell le 7 août 1902 au Vignemale sous la grotte Bellevue (6 h du matin).
(c) Archives départementales de la Haute-Garonne, Fonds Jean Bories, cote 82 FI NEG 68

Retour au menu

Image

La visite de certains hauts lieux, comme le lac de Gaube, pendant un séjour thermal devient incontournable. Ces sites s’inscrivent dans l’histoire du pyrénéisme :

Cirque de Gavarnie, « œuvre d’art de la fauve nature »*

Dès la fin du 18e siècle, la notoriété de Gavarnie attire les curistes, subjugués par la sauvagerie du lieu, le caractère monumental de ce cirque de 6 kilomètres de diamètre, ses murailles à pic disposées en paliers parcourus d'immenses cascades, et ses sommets culminant à plus de 3000 mètres. La première ascension du Mont Perdu est réalisée en 1802 par Ramond de Carbonnières. Dès lors, les curieux affluent, Gavarnie devient l’étape pyrénéenne incontournable. Une famille de guides de haute montagne, les Passet, les conduisent sur les sommets. En 1864, la route carrossable améliore l’accès et évite les sentiers périlleux à dos de mulet depuis Luz-Saint-Sauveur.
*qualificatif employé par Victor Hugo.

Le Vignemale, ascensions et expéditions mythiques

Conquis par Anne Lister en 1836, puis en hiver par Henry Russell en 1869, le sommet français des Pyrénées est un haut lieu par les récits d’ascensions célèbres et les expéditions scientifiques qui s’y déroulent.

Le Pic du Midi de Bigorre, balcon sur les Pyrénées et le ciel étoilé

Le Pic du Midi a inspiré de nombreux récits scientifiques (Ramond), littéraires (Jules Verne, Russell) ou poétiques. Dès le 19e siècle, il devient un lieu d’observation privilégié pour les astronomes. L’observatoire, construit en 1878, et le panorama qu’il offre, font de lui un symbole romantique et moderne dans la littérature pyrénéenne. En 1920, Claire-Eliane Engel, écrivaine et alpiniste, le décrit comme un lieu d’aventure féminine. Le sommet est aussi décrit par Marguerite Burnat-Provins en 1907, dans ses carnets de voyage : « Les montagnes sont des cathédrales où la terre prie le ciel. Chaque sommet est une flèche tendue vers l’infini, chaque vallon un chœur où murmurent les sources et les vents. On y monte comme on entre en soi-même, et l’on en redescend transformé, le cœur plus léger, l’âme plus haute. » En 1952, le téléphérique rend le site accessible à tous ; il devient un haut lieu touristique.

Image
Retour au menu

Image

La mode du « Voyage aux Pyrénées » a inspiré récits et correspondances. De grands écrivains comme Victor Hugo, George Sand ou Chateaubriand ont contribué à populariser ces régions par leurs récits de voyage et leurs descriptions poétiques. Peintres et dessinateurs ont aussi participé à la renommée de ces lieux, tout en les documentant précieusement, y compris par leurs représentations des coutumes, costumes et danses locales.

George Sand, vers 1825 :
« Enfin, nous sommes entrés dans les Pyrénées. La surprise et l’admiration m’ont saisie jusqu’à l’étouffement [...] Je ne me figurais pas la hauteur de ces masses qui touchent les nuages ». 

Le séjour de Chateaubriand à Cauterets en 1829 inspire des passages dans Mémoires d’outre-tombe. Cauterets devient un lieu emblématique de la littérature romantique. 
« Je marchais le long d’un torrent, je m’enfonçais dans une gorge, la plus sauvage qu’il y ait, et, sous prétexte de me tremper dans l’eau chaude et de boire du soufre, j’avais tous les jours un spectacle nouveau, inattendu et merveilleux. » « Les Pyrénées, avec leurs sommets escarpés, leurs cascades, leurs forêts, offrent un spectacle qui n’a rien de commun avec les autres montagnes. » 

En 1840, le jeune Flaubert y effectue un voyage initiatique à 19 ans. Ses descriptions offrent un témoignage de la vision romantique que l’on a des paysages au 19e siècle. 
A propos du lac de Gaube : « Sa teinte vert de gris le fait confondre avec l’herbe, l’eau si calme qu’on dirait une grande glace verte. » (Voyage dans les Pyrénées et en Corse, ne sera publié qu’en 1885, bien après sa mort, sous le titre Par les champs et les grèves).

Victor Hugo, en 1843 : 
« Cauterets, 26 août. — La vallée est paisible, l’escarpement est silencieux. Le vent se tait. Tout à coup, à un coude de la montagne, le gave apparaît. C’est le bruit d’une mêlée, c’en est l’aspect. Les combattants hurlent de rage et l’on croit voir voler les projectiles. » (En voyage, tome II, 1910).  « Cauterets est un de ces lieux où la nature semble avoir mis toute sa puissance et toute sa grâce. Les montagnes y sont majestueuses, les eaux vives et claires, les forêts profondes. On y respire un air de liberté et de grandeur. » (En voyage, tome II). « Ici, tout est mouvement, tout est vie. Le gave, ce torrent furieux, bondit comme un cheval sauvage. Les rochers, les arbres, les nuages, tout semble participer à cette agitation joyeuse et terrible. » (Carnets de voyage, 1843).

Regards de peintres

Eugène Delacroix a séjourné dans les Pyrénées en juillet 1845. Son carnet de voyage (Carnet des Pyrénées"), classé "Trésor national" est conservé au musée du Louvre. Il contient des paysages, des études de costumes locaux, des scènes de vie montagnarde et des sommets pyrénéens, le tout réalisé à la mine de plomb, au crayon ou à l’aquarelle. 
« Il n’y a jamais de papier assez grand pour donner l’idée de ces masses…"

Victor Petit est connu pour ses vues sur les Pyrénées. Dès la fin des années 1840, il voyage dans les stations thermales, et publie des recueils consacrés à chaque ville d'eau "et ses environs" (Bagnères-de-Bigorre, Cauterets, Barèges, les Eaux bonnes, les Eaux chaudes, Saint-Sauveur).

Image
Image

Cascade du pont d'Espagne. Lithographie de Victor Petit (éd. 1817-1871) (c) Bibliothèque municipale de Toulous

Image

Panorama de montagnes, 1845. Eugène Delacroix (c) Le Louvre, Département des arts graphiques, RF 52997, 21

Retour au menu

Image

Fréquentés dès l’Antiquité et durant le Moyen Age, les Bains de Bagnères et Cauterets concentrent rapidement l’activité thermale moderne des Hautes-Pyrénées. La première station des Pyrénées, Bagnères-de-Bigorre, comptait déjà 31 établissements à la fin du 18e siècle. Elle participa activement à l’essor du thermalisme à l’échelle de la France et de l’Europe.

Bagnères-de-Bigorre

Entre le 16e et 18e siècle, la station est fréquentée par l'aristocratie qui a le choix entre un grand nombre d'établissements thermaux privés. Pionnière du thermalisme moderne, Bagnères connaît une expansion considérable tout au long du 19e siècle, entièrement liée à son activité. Ainsi, à compter du Second Empire, un nouveau quartier voit le jour en contrebas de la Fontaine Ferrugineuse, avec la construction de dizaines de villas de villégiature. Les Grands Thermes, qui réunissent plusieurs sources à l'extérieur des remparts, sont inaugurés en 1828. Les néothermes-casino sont bâtis en 1879. L’ensemble de la ville porte la marque de cette activité touristique : on y lit la présence de nombreuses pensions de voyageurs et d'hôtels. La commune devient « station hydrominérale et climatique » par décret de 1913.
La renommée de la station thermale est liée à celle de ses médecins, aux soins pratiqués comme aux recherches menées sur les bienfaits des eaux. Les cabinets et domiciles de médecins en exercice sont ainsi signalés dans les guides touristiques dès la fin du 18e siècle, et sur les cartes à destination des curistes.

Cauterets

Les bains de Cauterets acquièrent rapidement une renommée internationale et attirent l'aristocratie et des baigneurs venus de France et d’Espagne. L'histoire de la station est marquée par les séjours de Marguerite de Navarre au 16e siècle. Dans les années 1800, les sources sont canalisées dans le village. Ces nouvelles infrastructures permettent la modernisation de la station, la reconstruction de son patrimoine bâti ainsi que la construction des thermes de César et des Bains du Rocher. Au 19e siècle, des villas et hôtels sont construits sur la rive gauche du Gave. La ville de Cauterets devient « station hydrominérale et climatique » par décret en 1919.
 

Image
Retour au menu

 

Crédits :

Texte : Stéphanie Brunon, Luth Médiations
Conception, relecture et carte : Christelle Parville et Alice de la Taille, Direction de la Culture et du Patrimoine, Région Occitanie
Graphisme : Gisèle Jacquemet, Luth Médiations