L’opération d’inventaire de Saint-Bertrand-de-Comminges : méthode et champs d’investigation

Paragraphe
Paragraphe niveau 2
Corps

Depuis le mois de mars 2024 a débuté une nouvelle étude d'inventaire topographique du patrimoine sur le territoire de Saint-Bertrand-de-Comminges menée par deux chercheurs du service Connaissance et Inventaire des Patrimoines de la Région Occitanie, Alexandra Guéguen et Paul Maturi. Elle a pour but de recenser l'ensemble du patrimoine, de réaliser des études complètes sur des œuvres présentant un intérêt artistique ou historique et rédiger une synthèse sur l'histoire de l’occupation de la commune.

Média
Image
Corps

Implanté sur les contreforts des Pyrénées centrales, au sud de la Haute-Garonne, Saint-Bertrand-de-Comminges est reconnu depuis longtemps pour la richesse de son patrimoine architectural et mobilier. Son histoire a fait l’objet de nombreuses publications :  des guides de voyageurs en recherche de pittoresque jusqu’aux thèses universitaires abondamment sourcées. Les fouilles archéologiques du début du 20e siècle à nos jours ont permis de redécouvrir la cité de Lugdunum Convenarum citée par Grégoire de Tours au VIe siècle. Cette capitale des Convènes, fondée au 1er siècle, a peu à peu révélé son centre monumental avec son marché, ses monuments, ses thermes, son théâtre ainsi qu'en périphérie ses nécropoles, sa basilique et un camp militaire à Tranquistan.

À première vue, cette capitale religieuse du Comminges et siège d’évêché, largement documentée et étudiée, a livré tous ses secrets. Pourtant, l’état de la bibliographie révèle qu’une part importante des écrits sur Saint-Bertrand concernent ses édifices les plus emblématiques, en particulier la cathédrale Sainte-Marie, son mobilier et son cloitre, au détriment de l’architecture civile.

Si les opérations archéologiques en cours à Saint-Bertrand ont permis de renouveler la connaissance sur les origines de la ville, l’inventaire du patrimoine pourrait apporter sa contribution à la recherche pour des périodes plus récentes de son histoire. Une opération topographique, qui s’emploierait à examiner le bâti à la parcelle et sur une temporalité longue, est tout à fait indiquée pour répondre à cet objectif.

Média
Image
Image
Image
Corps

Une première étude a été réalisée en 2015 par Oriane Pilloix[1], stagiaire au service de l’Inventaire en ex-Région Midi-Pyrénées, donnant lieu à la rédaction de 17 dossiers d’inventaire et des synthèses sur la ville haute et le faubourg du Plan.

Depuis mars 2024, une seconde mission d’inventaire topographique a débuté, pilotée par les chercheurs Alexandra Guéguen et Paul Maturi du service Connaissance et Inventaires des Patrimoine de la Région Occitanie. Bien que le fil conducteur de cette étude soit l’histoire de l’occupation de la ville et ses alentours, d’autres axes de recherche ont été dégagés afin de cadrer les prospections sur le terrain et la recherche documentaire :  

Titre
Les remplois dans l’architecture
Corps

L’omniprésence des remplois est particulièrement perceptible dans certaines constructions de la ville. L’observation attentive des maçonneries suffit à se faire une idée de l’abondance des moellons ou autres blocs de pierre provenant de constructions plus anciennes. En effet, l’histoire mouvementée de Saint-Bertrand-de-Comminges, traversées par des périodes de déprises urbaines et de reconstructions, a été particulièrement propice à la récupération de matériaux de construction. 
Les mauvaises routes, encore signalées au début du 20e siècle, transforment l’acheminement de matériaux en une entreprise risquée et couteuse. Parallèlement, la présence de ruines à l’intérieur même de l’enceinte constitue une réserve de matières premières bien commode pour les habitants souhaitant bâtir leur habitation. 
Des fragments lapidaires visibles dans des constructions du bourg portent des inscriptions latines trahissant leurs origines antiques. Ces morceaux d’autels tauroboliques, de monuments funéraires, des frises et autres décors proviennent de Lugdunum Convenarum qui s’étendait au pied de la ville haute. Ils arborent parfois un décor sculpté laissant penser que leur réutilisation présente un caractère esthétique. 
Puisque leur abondance constitue une particularité architecturale intrinsèquement liée à l’histoire de Saint-Bertrand, les remplois font l’objet d’une attention particulière dans l’opération d’inventaire. Les chercheurs précisent systématiquement leur forme (sculpture, chanfrein, chronogramme, inscription, etc.) et leur emplacement dans les bâtiments étudiés et repérés.

Média
Image
Image
Image
Image
Titre
Le bâti du 18e siècle
Corps

Si les constructions antérieures au 19e siècle semblent généralement remaniées à différentes époques, ce n’est pas le cas pour le bâti du 18e siècle qui présente une certaine homogénéité. Les premiers repérages de terrain dans les intérieurs de maison ont aussi révélé de nombreux éléments (escaliers, cheminées, boiseries) datables de cette époque. Il semblerait donc qu’un élan constructif se soit emparé des commingeois au 18e siècle. Grâce aux visites sur le terrain, l’inventaire permettra de déterminer si cette impression se vérifie à plus grande échelle dans la ville. La recherche documentaire pourra aussi apporter des réponses sur le contexte qui a favorisé et rendu possible ces constructions à cette période. 

Média
Image
Image
Image
Titre
L’habitat des élites
Corps

L’opération d’inventaire s’attachera également à déterminer la part de l’habitat ayant appartenu à l’évêque du Comminges et aux chanoines, co-seigneurs de Saint-Bertrand jusqu’à la Révolution, ainsi qu’aux prébendiers du chapitre cathédral. Pour ce faire, l’étude systématique des états de sections, des matrices cadastrales (1791 et 1831) et des fonds de notaires permettra de reconstituer, à la parcelle, l’historique des propriétés. Une fois identifiées, ces maisons seront soumises à un examen comparatif pour établir leur homogénéité, ou au contraire, leurs différences en termes de date de construction, de formes, d’évolution dans le temps et d’implantation dans la ville. 

Média
Image
Image
Image
Image
Titre
Les usages de l’eau
Corps

Dès l’Antiquité, Lugdunum Convenarum était approvisionné en eau grâce à une source située au nord-ouest de la ville[2] et acheminée à l’aide d’un aqueduc. Bien plus tardivement, à l’Époque moderne, la population va chercher de l’eau à une fontaine située devant le parvis de la cathédrale et à un puits commun sur la place de Laprade au faubourg du Plan. En 1857, un grand programme d'adduction d'eau est réalisé afin d'acheminer l'eau d'une source située à plusieurs kilomètres jusqu'à la fontaine de la place de la cathédrale, alors tarie.

Lavoirs, fontaines, abreuvoirs, château d’eau, rigoles d’irrigations… le patrimoine de l’eau prend des formes multiples à Saint-Bertrand. Cette thématique, qui s’intègre au projet de recherche transversal à l’échelle du réseau de l’Inventaire de la Région Occitanie fera l’objet de dossiers d’œuvres et d’un dossier thématique de synthèse.

À Saint-Bertrand, si les ressources documentaires sur les aménagements liés à l’eau font défaut pour les périodes antérieures à la Révolution, les archives sont abondantes à partir du 19e siècle. Les chercheurs pourront s’appuyer sur cette documentation fournie pour étudier cette thématique.

Média
Image
Image
Titre
Consultez les dossiers d’inventaire de Saint-Bertrand-de-Comminges :
Corps

[1] Oriane Pilloix a notamment étudié la cathédrale dans le cadre d’un mémoire : Pilloix Oriane, Les parties romanes de l’ancienne cathédrale Sainte-Marie-de-Saint-Bertrand-de-Comminges, 2016.

[2] À l’emplacement de l’actuel village de Tibiran.

Auteurs : Alexandra Guéguen, chercheuse, Service Connaissance et Inventaire des Patrimoines, Région Occitanie ; Paul Maturi chercheur, Service Connaissance et Inventaire des Patrimoines, Région Occitanie

Pour citer ce billet : Alexandra Guéguen et Paul Maturi (11/02/2025). L’opération d’inventaire de Saint-Bertrand-de-Comminges : méthode et champs d’investigation. URL :  https://patrimoines.laregion.fr/node/2687/

Mots clés
Inventaire, Saint-Bertrand-de-Comminges